Une joyeuse bande de petits hobereaux de province, qui ont eu pour condisciple chez les P?res un jeune boursier, fils de la blanchisseuse du coll?ge, nomm? Bitos, qu'ils d?testaient et qui est revenu dans le pays apr?s la Lib?ration en qualit? de substitut, d?cident (le l'inviter ? une sorte de surprise-partie o? ils le ridiculiseront et peut-?tre te battront.
L'un d'eux, Maxime, vient d'h?riter un local historique (qu'il se propose de vendre d'ailleurs tr?s r?alistement ? la Shell pour y faire un garage). C'est un ancien prieur? des Carmes o? le Tribunal R?volutionnaire tenait ses assises en 93 et o? ses anc?tres ont ?t? condamn?s ? mort. Y pendre la cr?maill?re sera le pr?texte de la soir?e-pi?ge o? il invite Bitos. Il y organise un d?ner de t?tes r?volutionnaires o? chacun devra jouer s?rieusement son r?le, et persuade Bitos (qui se prend volontiers pour le dictateur rouge) de se faire la t?te de Robespierre. Malentendu, m?connaissance des usages de Bitos, ou sournoiserie de Maxime, le pauvre Bitos arrive d?guis? de pied en cap en Robespierre au milieu des h?tes en smoking.
Le d?ner, malgr? la r?action de quelques-uns qui oint piti? de lui, se d?roule, ? heu de chose pr?s, comme l'avait pr?vu Maxime. Mais lorsque le dernier invit? - un petit d?voy? de bonne famille qui a fait une b?tise et contre lequel Bitos, pour des raisons de haine personnelle et politique, a requis durement le maximum - fait son entr?e en Gendarme Merda et lui tire - pour rire - un coup de pistolet ? blanc dans la m?choire, Bitos, ?vanoui de peur, revit la vie de Robespierre pendant les cinquante secondes de son ?vanouissement. Un Robespierre qui lui ressemble plus qu'au vrai et qui a d'ailleurs conserv? - en 93 - son chapeau melon.
Cette vie imaginaire de Bitos-Robespierre sera le sujet du second acte.
Au troisi?me acte, il s'agira de faire boire Bitos, de le flatter, de le s?duire et m?me d'essayer de le corrompre pour obtenir qu'il ne porte pas plainte contre le petit jeune homme lib?r? de la veille, coupable de cette mauvaise plaisanterie qui peut tr?s bien devenir une insulte ? magistrat. Les femmes et un homme riche et cynique, Brassac (qui se vante de faire partie de la fausse liste des 200 familles), l'essaieront.
Bitos, qui n'a pas - loin de l? - la grandeur d'?me de son anc?tre-dictateur, risquerait de tomber dans le pi?ge encore plus dangereux que le premier. Une jeune fille lucide et prise de piti? l'en sauvera in extremis niais, comme Bitos a d?cid?ment l'?me basse, c'est elle qu'il d?testera le plus.
Jean ANOUILH