Mary et Victor sont mari?s depuis seine ans, ils ont deux enfants, Victor est un homme doux et bon, vaguement ridicule. Il est chirurgien-dentiste et il ne sait pas parler d'autre chose que de dents, il aime faire d'innocentes farces - coussins truqu?s, cigares-attrapes ? ses amis. Mary a du l'aimer quand ils se sont unis, elle l'aime encore tendrement mais elle a rencontr? Clive, un homme qui lui a r?v?l? une nouvelle vie de femme - il est son amant. Rien de plus banal et un petit adult?re confortable pouvait, sans qu'il y ait de pi?ce, faire de la vie de Mary, dans sa banlieue de Londres, une vie de femme somme toute assez ordonn?e
Seulement Clive, qui a toujours ?t? l'amant de femmes mari?e, ne peut plus, un beau jour, t?moigner de cette " complaisance " qui est le lot des amants, que tout le monde croit combl?s dans les m?nages ? trois. Clive s'aper?oit qu'il a envie d'avoir une femme ? lui et que faire l'amour pour finir ce n'est pas seulement avoir une femme deux heures par jour dans son lit, c'est manger la soupe avec elle, avoir le droit de s'endormir pr?s d'elle le soir et lui faire partager les petits soucis de sa vie. Mary lui donne tout et il s'aper?oit qu'il n'a rien et que l'adult?re de cinq ? sept n'est qu'une friandise d?risoire pour un homme qui a faim de Pain.
A la faveur d'une escapade ? Amsterdam - o? les deux amants ont pu voler trois jours sous un ?chafaudage de mensonges, qui finit par tourner au vaudeville - car le vaudeville guette les amants adult?res m?me s'ils gardent le revolver de la trag?die ? port?e de leur main sur leur table de nuit. Clive, d'une fa?on assez peu ?l?gante, tente de provoquer le scandale pour forcer Mary ? divorcer.
Il n'y r?ussira pas. Victor le demi-ridicule va se r?v?ler sage, bon et fort. Mary englu?e dans son dur m?tier de femme, courant, pauvre mouche, de la ch?vre au chou, avec des plaies ? soigner de tous les c?t?s, ne saura pas se hausser .jusqu'au ton des h?ro?nes de la quatri?me page des journaux pour qui le mot passion, le mot le plus galvaud? de la langue fran?aise, justifie les pires sacrifices - le sacrifice des autres naturellement. Elle restera tremblante sur la branche et Clive s'il veut la garder devra r?endosser sa livr?e d'amant complaisant.
L'adult?re - qui est une chose triste, qui fait rire la France depuis le Moyen Age - honn?tement pos?, cartes sur table, par un Anglais.
Nicole et Jean ANOUILH