Le 27 novembre 1977, paraissait dans Le Figaro un article de Jean Anouilh présentant un futur spectacle : « J’avais, il y a bien des années, sérieusement étudié l’histoire du début de XVIIème siècle pour un film sur les Concini – ce couple d’aventuriers qui est venu à Paris, dans la suite florentine de Marie de Médicis (…) Lui, noble maquereau de profession, elle, Léonora Galigaï, confidente et souffre-douleur de la princesse (…) Le film ne s’étant pas fait, j’avais, comme toujours, oublié toutes ces notes et projets de scènes, quand un jour, les retrouvant par hasard, l’idée m’est venue de traiter les évènements multiples (…) Un matin tout naturellement, Henri a surgi. Et puis, très vite, presque malgré moi, avec sa gaillardise accoutumée, il s’est taillé la première place, sorte de Tintin barbu et puant l’ail, qui promène sa naïveté et ses ruses dans cette histoire (…) Vive Henri IV ! Grâce à lui je n’ai pas encore écrit une pièce… ( comme gémissent mes critiques chaque année ! ) j’ai écrit une bande dessinée et je me suis bien amusé ».
Intitulée Léonora ou les maquereaux l’œuvre fut d’abord présentée à la Maison des Arts et de la Culture de Créteil, en octobre 1977, puis, sous le titre de Vive Henri IV !, elle fut reprise au Théâtre de Paris le 24 novembre de la même année, dans une mise en scène de Nicole Anouilh.

Vive Henri IV !
Daniel Ivernel
programme original
Collections A.R.T.
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Comme pour Chers Zoiseaux, la critique fut unanime et applaudit les qualités de l’auteur, « son esprit caustique et narquois » et son « insolente virtuosité ». Quant au public, une fois encore, il s’amusa beaucoup.
Bien qu’il eut déjà écrit Antigone et Tu étais si gentil quand tu était petit, Anouilh se sentit attiré de nouveau vers les personnages de Sophocle et il prit plaisir à ressusciter Œdipe. La pièce fut publiée en 1986 mais ne fut jamais montée. Pierre Marcabru, après avoir lu l’ouvrage, décrivait ainsi Anouilh comme un : « Réactionnaire plus que conservateur, anarchiste plus que réactionnaire, se tenant en marge de la république des lettres, loin des honneurs, bien dans son île, il s’amuse à éventer les mèches, politiques ou morales, avec une malice goguenarde (…) s’installant au delà des modes dans un observatoire tranquille d’où il suit l’humaine comédie, l’œil pétillant et pointu ».
Quand L’ O.N.U déclara que 1975 serait « L’ Année internationale de la femme », le sexe faible s’en donna à cœur joie. Ainsi naquit du Mouvement de Libération de la Femme réunissant une troupe d’amazones prêtes à en découvre avec le reste de l’humanité, à savoir les pauvres hommes qui n’en pouvaient mais…
L’occasion était trop belle… Jean Anouilh ne pouvait la laisser passer sans exercer son ironie narquoise et anti féministe. Les femmes allaient-elles bientôt porter culotte ? Bravo ! Voici tout trouver le sujet et le titre d’un nouvel ouvrage : La Culotte.

La Culotte
L'Avant-scène mai 1979
Coll. part.
Le rideau du théâtre de l’Atelier se levait, le 22 septembre 1978, sur les malheurs de Léon de Saint-Pé, académicien. Les mains attachées derrière le dos, il attendait son procès. Coureur de jupons, suborneur de sa bonne, à qui il avait fait un enfant, il était poursuivi devant un tribunal où siégeait une certaine Madame Simone Beaumanoir ( !!! ) présidente du Comité des Femmes libres du XVI ème arrondissement. Il encourait la peine de la castration… Il fut sauvé in extremis par sa fuite clandestine avec son valet…
Pour la critique, la question se posait : était-ce une pièce futuriste ? La société française était-elle en train d’évoluer à ce point ? Le public lui, sifflait beaucoup mais riait encore davantage. De sorte que la pièce fut jouée pendant plus de dix mois.

Ariane Carletti, Christian Marin, Jean-pierre Marielle et Jacqueline Jehanneuf vus par Lebon
in L'Avant-scène mai 1979
Alors qu’il fêtait ses soixante-dix ans, Jean Anouilh eut l’honneur de recevoir le Grand Prix du Théâtre de l’Académie Française. Il était enfin reconnu par ses pairs. Quelques mois auparavant Pascal Jardin l’avait gratifié d’une sorte de panégyrique : « On dit Anouilh réactionnaire. Il l’est, et très au-dessus du sens politique usuel employé de nos jours. Il est en réaction comme la peau d’un enfant sous une giclée d’acide. Il est réactionnaire, et il l’aurait été hier, et il le sera demain, car si du temps de l’ancien régime, il fallait supporter d’entendre le Roi dire « Nous », pour des raisons inverses dans ces temps socialistes on dit « Nous » également. Or Anouilh, c’est l’Auteur. Il est seul. Il dit « Je » et c’est un « Je » majuscule et classique qui franchira l’époque, et résonnera plus tard, tels les éclats de larmes d’un diable de province qui dans son jeune temps aurait connu le Paradis ».
Jean Mara Minute 27 octobre 1977
Jean-Jacques Gautier Le Figaro 26 septembre 1977
Pierre Marcabru Le Figaro 19 mars 1986
L’Avant-scène 15 décembre 1977