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Une vocation musicale contrariée

La Cannebière 1911
André Roussin est né le 22 janvier 1911, à Marseille, d’une famille de magistrats et d’industriels. Sa première passion fut le violon. À huit ans, emmené par son père à la Société des Concerts classiques de Marseille, il entend Jacques Thibaut. Ce fut une révélation et il décida de devenir violoniste. C’était pour les parents, à n’en pas douter, une vocation, le pensait-il, mais après six mois de travail acharné, il se rangeait à leur avis : il est préférable de ne pas jouer de violon si on n’en joue pas parfaitement bien. À 15 ans, il abandonne l’instrument qui l’occupât pendant de nombreuses années, pour, déjà, l’art dramatique. Il écrit une pièce en vers, un drame dans le style héroïque, qui ne comptait pas moins de 8OO vers. Tous les membres de la famille prirent connaissance de la pièce. Ils baptisèrent l’auteur Pagnolet, en référence à Marcel Pagnol, qui connaissait à l’époque un énorme succès avec Topaze. Tandis qu’il entre à la faculté de droit de Marseille, tout en poursuivant ses études, il dévore toutes les pièces publiées dans La Petite Illustration, toujours fasciné par le théâtre. Il est refusé à son examen, malgré une année très studieuse, mais a écrit une comédie - il a définitivement renoncé au drame et à la poésie - La Coqueluche. Il la lit devant la famille, avec un certain succès, et les parents semblent à présent prendre au sérieux son désir de faire du théâtre. Il prépare alors une licence de lettres, et il est à nouveau refusé à l’écrit. Il en profite pour arrêter ses études, car il n’avait nullement l’intention de devenir professeur, qui en était l’aboutissement naturel. Entre temps, il avait participé, en qualité d’acteur, à des spectacles d’amateurs, et les succès faciles qu’il y avait remporté, le confirment dans son désir de devenir comédien.
Son père l’autorise alors à monter à Paris. Mais, 8 jours avant son départ, il avait participé dans les salons de l’hôtel Splendid, à une revue Ta Girl, au cours de laquelle il fait la connaissance de celui qui allait devenir son alter ego, Louis Ducreux.
Il rencontre également Paul Geraldy, venu faire une conférence à Marseille, et fait part à l’auteur de Toi et Moi, de son désir de faire du théâtre. Geraldy lui conseille alors de venir le voir à Paris.
À nous deux Paris !
Arrivé dans la capitale, il prend son emploi dans les Assurances, à la Compagnie La Flandre, dirigée par un ami de son père qui était intervenu afin qu’il soit engagé comme stagiaire. Il y restera 8 mois. Il se rend comme prévu chez Paul Geraldy qui lui conseille d’aller voir Pierre Fresnay. Ce dernier, qui jouait Nono de Sacha Guitry au Théâtre de la Madeleine, le reçoit très gentiment, et lui assène : « Le Théâtre est le plus beau métier du monde si on réussit, le pire si on végète. Vous quitterez votre bureau quand vous sentirez que ça marche. Jusque là, restez-y ».
Fresnay l’adresse à Fernand Ledoux, alors pensionnaire de la Comédie Française, qui lui conseille de travailler Alceste. Il s’attaque également à Fantasio, Octave et Clitandre, mais si le bureau lui apparaît sans intérêt véritable, le théâtre lui semble toujours inaccessible. Ledoux l’envoie à l’Odéon où avaient lieu des auditions en vue des engagements de la saison suivante. Il n’est pas retenu. Entre temps, il avait appris que Louis Ducreux avait fondé à Marseille une Compagnie d’amateurs Le Rideau Gris qui donnait chaque mois une pièce inédite pour Marseille et que, dans cette Compagnie, figurait son frère, assureur professionnel qui devenait acteur chez Ducreux alors que lui, acteur dans l’âme était amateur dans une compagnie d’assurances ! Il profite de la voiture d’un cousin qui gagnait la côte pour quitter Paris et les Assurances.
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