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Naissance d’une sensibilité de gauche
Armand Salacrou est né à Rouen le 9 août 1899, d’un père herboriste. Ce père était l’un des onze enfants d’une famille de très pauvres paysans de la région d’Yvetot, famille rouge. Il fut protégé par la châtelaine du lieu qui l’envoya à Rouen afin de passer l’examen permettant l’entrée à la Faculté de pharmacie. Mais il arrivait de son village et n’avait pas fréquenté le collège. Ainsi ne fut-il jamais pharmacien, même de deuxième classe. Il devint, à 17 ans, préparateur en pharmacie. Le pharmacien qui l’employait était l’inventeur de la jouvence de l’Abbé Soury, qui joua un grand rôle dans la vie d’Armand Salacrou… Le père passa l’examen d’herboriste et fut reçu, ce qui lui permit d’afficher plus tard sur son officine Diplômé de l’école de médecine et de pharmacie, le diplôme d’herboriste étant décerné par cette école. Cette officine, il l’ouvrit au Havre, où il s’installa définitivement en 1902.
Armand fit dans cette ville de très bonnes études primaires, avec chaque année le prix d’excellence, ce qui lui permit d’entrer dans un lycée parisien en 1917, pour aboutir à une licence de philosophie et à une licence de droit. À 16 ans, réagissant avec une sensibilité de gauche, déjà révolté, il écrit l’Éternelle chanson des gueux, où il s’indigne du décalage entre la misère du port et la fortune des armateurs, et où il s’interroge déjà sur la solitude de l’homme. Il adresse son texte à l’Humanité, qui le publie. Il avait déjà fondé les jeunesses socialistes du Havre. À Paris, poursuivant ses études de médecine, il se fait engager dans un service de cardiologie à l’hôpital de la Pitié, et fait fonction d’externe à l’hôpital Saint-Antoine. Il abandonne vite les études de médecine pour la Sorbonne où il obtiendra ses licences. Il fréquente les surréalistes, les théâtres et les peintres, guidé par ses amis d’enfance Georges Limbour et Jean Dubuffet, et se lie d’amitié avec Roger Vitrac, Robert Desnos, Antonin Artaud et Max Jacob.
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