Claudel renouvela plusieurs fois l’ expérience musicale. Ce fut ainsi que Jeanne au bûcher, oratorio dramatique, sur une musique d’Arthur Honneger fut reçu avec le plus grand enthousiasme, tant par le public que par la critique.
Alors qu’il était en poste au Japon, s’inspirant du No, Claudel écrivit l’argument de La Femme et son ombre mimodrame musical, créé en 1923 au théâtre Impérial de Tokyo et repris par le chorégraphe Rolland Petit, au théâtre des Champs-Élysées.

Paul Claudel après le tremblement de terre à Yokohama
en 1923
in Barraud-Renaud, Paris, notre siècle
(photo DR)
Coll. part.
En 1927, Claudel fut contacté pour écrire un second mimodrame à l’occasion d’une fête en l’honneur du centenaire du célèbre physicien M. Berthellot. L’œuvre s’intitula Sous les remparts d’Athenes, sur une musique de Germaine Tailleferre et fut interprété au palais de l’Élysées. Claudel déclara alors que le but de son ouvrage était « de créer derrière le drame une espèce de tapisserie sonore, dont les couleurs amusent et soulagent le spectateur et baignent de leurs reflets agréables, l'aridité d’une discussion philosophique ».
Mais revenons en arrière, alors que le onzième jour du onzième mois 1919 l’Armistice venait de sonner, Paul Claudel, alors en mission à Copenhague, entreprit l’écriture de l’un de ses futurs chef d’œuvre : Le Soulier de satin.
Influence des auteurs grecs : la Trilogie
Entre temps, Claudel eut l’intention de reprendre les personnages de L’Otage et, à l ‘instar d’Eschyle, de composer une série de trois pièces, intitulée : La trilogie des Coûfontaine. Après L’Otage, ce fut Le Pain dur et pour finir : Le Père humilié.
Dans Le Pain dur « le point limite du mythe freudien », l’action se passait vingt ans après celle de L’Otage. Sous le règne de Louis Philippe, Louis de Coûfontaine, fils né de l’étreinte insupportable de Sygne et de Turelure, fut un enfant maudit : « Ma mère a mieux aimé mourir que de me voir et mon père, dès que je suis né, a mis tout son cœur à me détester . » . Officier lors de la guerre d’Algérie, Louis s‘était endetté auprès de Lumir dont il s’était épris. Quand la jeune fille désira récupérer son argent pour aider à la libération de sa patrie, la Pologne. Louis apprit qu’il avait été dépossédé de l’héritage de sa mère par son père et que ce dernier cherchait à lui voler son amoureuse. Il souhaita tuer Turelure , affolé ,ce dernier mourut de peur. et après avoir épousé la juive, Sichel, l’ancienne maîtresse de son père, Louis devint à son tour Comte de Coûfontaine : « une figure la plus dégradée, la plus dégénérée du père. »
La dernière œuvre de la trilogie : Le Père humilié, fut écrite alors que Claudel était en mission à Rome. Cette fois, la pièce se déroulait en Italie lors de la guerre de 1870 entre la France et l’Allemagne. Le général Garibaldi s’était emparé des Etats du pape. Pensée, la fille aveugle de la juive Sichel et de Louis de Coûfontaine, devenu ambassadeur de France à Rome - était courtisée par les deux neveux de Pie IX, Orso et Orian. Ce dernier cherchait à oublier Pensée pour se consacrer à son futur engagement dans l’armée papale. Quoiqu’éloigné, il pensait toujours à la jeune fille et finit par la revoir avec tendresse. De leurs étreintes, devait naître un enfant . Enceinte d’un autre, Pensée se fiança à Orso. Hélas, ce dernier fut tué sur le champ de bataille. Pour sauver l’honneur du fils qu’elle attendait et pour pouvoir l’élever dignement, Pensée épousa Orian, son beau - frère. Ce dernier comprit alors que les sentiments qui attachent les amoureux sont beaucoup plus intenses que ceux qui « arrachent l’homme à son devoir ». Quant à Pensée, elle réalisa qu’elle n’était pour rien dans son propre bonheur : c’était leur destin, à tous les deux qui en avait décidé : « Heureuse que je suis, c’est lui qui m’a choisie, sans qu’il le sache. »
Paul Claudel fut assez satisfait de son travail. Ainsi écrit-t-il à Lugné Poë, le 16 juin 1914 : « J’ai relu Le Pain Dur dont je ne suis pas mécontent. Il y aurait là un magnifique rôle pour Guitry ( Turelure le Vieux ) s’il voulait prendre la pièce... » Concernant Le Père humilié, dans un courrier adressé le 7 septembre 1945, Claudel présenta sa pièce comme « un drame tout de sentiment et de poésie... » et l’année suivante « Le plus musical de tous mes drames ».
Après avoir été créé, en Allemagne, en 1926, la pièce Le Père humilié ne fut affichée,en France, qu’en 1946, au Théâtre des Champs-Élysées, puis repris en 1962, au Théâtre du Vieux Colombier, et au Théâtre du Rond-Point, accompagné, cette fois, des deux autres œuvres de la trilogie.

La Trilogie au vieux Colombier 1962
Collections A.R.T.
Tandis que sa mission diplomatique continuait à le conduire à travers le monde, San Francisco, Washington, Tokyo, Bruxelles, l’ambassadeur Claudel délaissa pour un temps la création théâtrale pour retravailler la plupart de ses œuvres anciennes et en récrire au besoin une seconde version
Quand il avait le loisir de revenir en France, il vivait le plus souvent dans le Dauphiné, au château de Brangues, acheté en 1927 et dans lequel il s’installa définitivement en 1935, lorsqu’il prit sa retraite.
Le 13 mars 1947, Paul Claudel entra à l’Académie Française et ce fut François Mauriac qui eût pour mission de lui remettre son épée.

Paul Claudel académicien
in programme original du Partage de Midi 1948
(photo DR)
Collections A.R.T.
Le Pain dur acte II, scène 2
Commentaire du psychanalyste Lacan
Commentaire du psychanalyste Lacan
Le Père humilié acte I, scène 1
Lucien Guitry, sans doute