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« Avant les trois Coups »

par Marie-Odile GIGOU - Ed. Bibliothèque historique de la Ville de Paris et Association de la Régie Théâtrale, 1982

Préface

En 1969, la Ville de Paris acceptait les collections de l’Association des Régisseurs de théâtre pour les confier à la Bibliothèque Historique. Le patrimoine de la Municipalité se trouve dès lors enrichi d’un fonds qui concerne en fait presque tout le théâtre français.

Pourquoi la Ville de Paris? Cela procède d’une certaine logique car l’immense majorité des créations se faisait à Paris ; ce n’est que depuis une dizaine d’années que la naissance de Centres dramatiques en province a provoqué une décentralisation de la création théâtrale.

Ce fonds, unique en son genre par les mises en scène qu’il contient, recouvre une grande partie de l’histoire du théâtre de la fin du XIXe siècle et de la première moitié du XXe.
Il permet de retrouver la vision qu’avaient, à cette époque, les gens du théâtre pour exprimer leur art, et de conserver leur enseigne­ment et leur expérience, même si la tendance actuelle de la création remet souvent en cause le travail passé et ne s’en sert pas toujours.

Pourtant il viendra un jour où, les contemporains disparus, il ne restera que les seuls documents écrits pour ne pas oublier tout à fait les grands moments théâtraux.

La Bibliothèque des régisseurs de théâtre s’est efforcée de conser­ver tout ce qu’elle pouvait réunir pour servir de « mémoire » aux générations futures. Avec patience et ténacité, elle a recueilli les mises en scène, s’efforçant aussi d’en défendre la propriété intellectuelle. Elle a amassé au fil du temps ouvrages, photos, dessins originaux et autographes, coupures de presse, etc.

Cette documentation a trouvé la place qui lui était nécessaire à l’Hôtel de Lamoignon. Mais le déplacement du fonds des régisseurs a provoqué une éclipse de la Bibliothèque : fermée au public pour être reclassée, elle a été oubliée par les chercheurs.

Par cette exposition, la Bibliothèque historique désire montrer la vitalité d’une de ses sections, relative à l’histoire culturelle de la Ville de Paris et rouvrir officiellement aux lecteurs cette mine inexploitée parce que méconnue.

Si Shakespeare a pu dire que « le monde entier est un théâtre où tous sont de simples acteurs», notre travail à la Bibliothèque ressem­ble beaucoup à l’activité d’un plateau de théâtre dont nous sommes les régisseurs. Que soient remerciés ici tous ceux qui ont participé à la « mise en scène » de l’exposition, le Bureau des Musées de la Ville et spécialement MM. Baudequin et Gros qui ont réalisé les encadrements, M. Soubrier, chef du service des expositions de la Ville, qui a entièrement restauré et présenté le Diorama de Sem et Roubille, M. G. Leyris, qui a effectué tous les clichés photographiques, Mme Gigou, qui a assuré, avec une compétence particulière, l’organisation de l’exposition et la rédaction du catalogue, aidée par Mme Sophie Glarner et Mme Dominique Boisson.

Hélène Verlet
Ancien Conservateur en chef de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris

Avant-propos

Pour élargir son recrutement et ouvrir ses portes aux metteurs en scène, l’Association des Régisseurs de Théâtres devient en 1976 l’Asso­ciation de la Régie Théâtrale.

Elle poursuit dans les locaux de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris sa quête de documentation théâtrale. Elle archive sous forme de vidéo-cassettes autant de mises en scène que ses moyens le lui permettent. Elle attribue sous l’égide bienveillante de la Ville de Paris et avec le concours éclairé des Amis de la Bibliothèque et des Régisseurs d’Honneur le «Prix du Brigadier» qui couronne l’événe­ment théâtral de chaque saison. En un mot elle poursuit l’œuvre entre­prise il y a plus de 70 ans par ses fondateurs et élargie au cours des années par leurs successeurs. L’esprit reste intact même si la forme change et la démarche du régisseur d’aujourd’hui, comme hier celle de ses pairs, s’identifie à la vie théâtrale de la même manière que la vie théâtrale s’identifie à l’histoire de notre temps. Si bien qu’en racontant les événements marquants de la vie de notre Association, c’est un peu l’histoire de notre siècle que raconte, en ce catalogue, Marie-Odile Gigou, notre efficace Conservatrice.

Effectivement, pour le Régisseur la forme a bien changé. Non que le portrait qu’en fait Louis Jouvet dans sa préface à Sabbatini soit devenu caduc, mais à cette omniprésence qu’il se plaît à lui reconnaître, aux différents aspects de son omniscience s’ajoutent deux maîtrises indispensables et qui n’ont pas fini de prendre de l’importance, ce sont celle de la lumière et celle du son.

Même si, cadre administratif, le régisseur d’aujourd’hui trouve en la personne des chefs électricien ou sonorisateur des collaborateurs de grand savoir et de grand talent, il ne peut se permettre d’ignorer ce qui fait leur spécialité. Il ne peut plus comme au temps de Jouvet apprendre son métier « sur le tas » et ce n’est pas la moindre fierté des mem­bres de l’A.R.T. que d’avoir réalisé le rêve de leurs prédécesseurs en traçant eux-mêmes les programmes de l’enseignement qui est dispensé dans les classes de Régie Théâtrale de l’École Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre ou du Centre de Formation Professionnelle des Techniciens du Spectacle.

Sans doute voient-ils dans cette démarche la possibilité de faire partager leur passion pour leur métier, passion qui aujourd’hui, grâce à la Ville de Paris, s’exprime au grand jour.

Puisse cette exposition révéler au public maints trésors ignorés, puisse-t-elle encourager les heureux détenteurs de documentation théâtrale à nous rejoindre et, par des dons généreux, à enrichir ces collections qui, amassées amoureusement dans le secret des cabinets obscurs, sont maintenant à la disposition de la collectivité.

Serge BOUILLON
Président d’Honneur de l’Association de la Régie Théâtrale