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François Billetdoux

par Geneviève LATOUR

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François Billetdoux copyright Germaine Lot

ou un Magicien du Théâtre
(1927 – 1991)

1. Une enfance sous le signe de la tragédie
2. Un conteur insatiable
3. Les premiers succès
4. Le Théâtre, un tyran bien-aimé
5. Une nouvelle conception théâtrale
6. A la Recherche de formes scéniques inédites
7. Un personnage officiel
8. Auteur décrié, écrivain reconnu
9. Une gloire fugitive
10. Quelques pièces

  1. Une enfance sous le signe de la tragédie

Le soir du 12 décembre 1927, à la sortie des stations de métro, les crieurs de journaux hurlent à pleine voix «  Demandez Le Petit Parisien ! Deux beaux frères se querellent, l’un d’eux est tué d’une balle au cœur…, Demandez la dernière édition ! » . Le drame s’est déroulé dans l’appartement de la victime en présence d’un bébé de trois mois dormant dans son berceau. Le petit François, né le 27 septembre précédent vient d’assister à l’assassinat de son jeune père par son oncle. Peut-être le pauvre chérubin a-t-il été réveillé au bruit sec du coup de feu ? peut-être pas ? Toujours est-il que son entourage familial restera fort évasif quand, plusieurs années après, l’enfant posera des questions sur la disparition de son papa et l’absence de son tonton . Ce sujet fait partie de ces secrets de famille que l’on « emporte dans sa tombe ».

Miniaturiste sur ivoire, Adrienne Billetdoux, veuve à vingt-trois ans et mère de deux enfants en bas âge, gagne difficilement sa vie. Le ciel soit loué, peu de temps plus tard, elle rencontre le second amour de sa vie. Elle se remarie. Le couple s’installe à Montmartre, rue Paul-Féval, Deux autres enfants naissent. La vie semble reprendre ses droits. Malheureusement, Adrienne est frappée de tuberculose, la maladie se développe très vite et la jeune femme s’éteint chez elle, le jour même des sept ans de François. L’enfant assiste au rituel d’un enterrement.

Au retour des obsèques, sa grand-mère maternelle le prend en charge, le séparant de son beau-père et de ses demi frère et sœur. Quoique institutrice, sans grands revenus, Mme Vidal assume sa mission : faire de son petit-fils un homme responsable. Elle lui inculque les notions de courage, de travail bien fait, de politesse, et d’économie. François prend des leçons de violon. François est bon élève, François va au catéchisme, François est enfant de chœur à l’église Saint-Pierre de Montrouge…

Étouffé par le secret des drames familiaux et bridé par l’éducation stricte de sa grand mère, le petit orphelin s’échappe du quotidien en se racontant des histoires et décide, à huit ans, de devenir écrivain. Quatre ans plus tard, élève au lycée Condorcet, il entre dans la compagnie des Mascarilles que dirige un professeur de Letttres, Jean Catel. Cette troupe de lycéens amateurs jouit d’une fameuse réputation dans les établissements secondaires de Paris et quand on annonce leur venue dans un lycée de filles, aucune d’elles ne manque à l’appel. C’est ainsi qu’à quatorze ans François Billetdoux obtient un rôle dans Le Livre de Christophe Colomb de Paul Claudel.

Février 1943, pour lui comme tous les lycéens de son âge, la tragédie ne se déroule pas que sur les planches, et François est embrigadé dans une section de secouristes chargée de déterrer les morts et de porter secours aux blessés lors des bombardements de Clichy et de Boulogne – Billancourt.

Août 1944, Paris est enfin libéré, François s’inscrit à la fois à la Sorbonne et au cours dramatique de Charles Dullin. «  Je ne cherchais pas à être comédien, mais plutôt à étudier la mise en scène. Je crois qu’au théâtre, il faut savoir tout faire ». (1)

Mai 1945, le cauchemar de la guerre prend fin. La victoire enflamme toute une génération  De nouveaux débouchés artistiques s’offrent aux jeunes et ils s’y jettent à corps perdu. Billetdoux est de toutes les innovations dans le domaine du spectacle et de la communication. Il entre à l’Institut des Hautes Etudes Cinématographique. L’année suivante, il fait partie du petit groupe réuni autour du poète Jean Tardieu et du musicien Pierre Schaeffer, créateurs du Club d’Essai de la Radiodiffusion Française. On charge François du service des Variétés. « La radio me tient lieu d’université » se vante-t-il à qui veut l’entendre. À dix-neuf ans, il signe, dans les bureaux de la rue Cognac-Jay son premier contrat de producteur-réalisateur en attendant celui de directeur des programmes de Radio-Martinique qui lui sera proposé en 1949 et l’obligera à quitter la France pour une année.

(1)  Le Théâtre d’Aujourd’hui Paul-Louis Mignon Edition de l’Avant-Scène 1966

2. Un conteur insatiable
Revenu à Paris, Billetdoux réintègre l’appartement de la rue Paul Féval. Voisin du célèbre cabaret Le Lapin Agile, il s’y fait engager et interprète chaque soir ses propres monologues, inspirés de Charles Cros. Deux resteront célèbres : Autodidacte et Le Bon Père ; ils lui seront redemandés à chacun de ses passages soit à l’Ecluse, soit chez Milord l’Arsouille… Et François se marie, il a vingt deux ans.

En 1951, père de deux petites filles, Virginie et Raphaële, Billetdoux se sent investi d’une responsabilité de père de famille. Il se doit d’assurer à sa femme et à ses enfants une vie confortable et bourgeoise. Commence alors pour lui la contrainte d’une production intense. Auteur de sketches quasi quotidiens qu’il doit fournir à la radio, il s’inscrit dans la liste des écrivains qui participent à l’inauguration du petit théâtre du Quartier Latin sous la direction de Michel de Ré. Dans le spectacle intitulé : Treize Pièces à Louer, François signe deux sketches : Opéra biographique  et À la Chasse comme à la chasse, ainsi que le texte des lyrics.
Le monde du théâtre découvre le nom d’un mystérieux Billetdoux et Pierre Berger, le critique de Paris Presse – l’Intransigeant, se demande s’il ne s’agit pas d’un nouveau canular de Raymond Queneau. Un peu agacé, François confirme qu’il est réellement l’auteur de ses œuvres et que son patronyme est bien réel : il s’appelle officiellement Billetdoux, d’une famille protestante d’origine bordelaise et pour en finir en beauté il prétend qu’un de ses aïeux était écrivain public !

Écrire des monologues, des sketches pour la radio, être applaudi à la Rose Rouge dans son numéro intitulé Scarface, cela ne suffit pas à François. Il a besoin de donner vie à toutes ces histoires qui se bousculent dans sa tête. L’heure de l’auteur dramatique a sonné.  Dans les studios de Cognacq-Jay, François a fait la connaissance d’un autre jeune écrivain, Jean Cosmos. Ensemble, ils décident d’écrire un spectacle, en deux parties, intitulé Les Plus Beaux Métiers du Monde. Le manuscrit est accepté au théâtre de l’Œuvre et affiché en mai 1955, dans une mise en scène de François Billetdoux lui-même.

S’inspirant d’un fait divers, Jean Cosmos a imaginé une pièce policière d’un genre nouveau. L’action se passe dans une salle de rédaction d’un grand quotidien. Deux journalistes reçoivent l’appel téléphonique d’un criminel anonyme. La pièce intitulée Au Jour, le Jour se termine sur un coup de feu. Après l’entr’acte, le rideau se relève sur la chambre d’une prostituée d’âge mûr ; elle reçoit un curieux client, petit homme timide, sans envergure, sans désir, qui n’arrête pas de parler d’une voix douce et triste. Le drame se noue peu à peu et la fille y perdra la vie. Ce drame signé Billetdoux se nomme À la Nuit la Nuit. Certes le public applaudit. Mais peu de critiques se déplacent. à l’exception d’un jeune journaliste Pierre Marcabru qui s’enthousiasme : «  Cet acte s’impose par sa densité aussi bien que par ses ruptures et ses retournements ». François définit l’aventure comme un « insuccès d’estime ».
Refusant de se cantonner dans son nouvel emploi d’auteur dramatique, Billetdoux rencontre Jacques Canetti, directeur du cabaret Aux Trois Baudets. Ce denier lui passe commande d’un spectacle de variétés : Hi Fi. Le thème traite des inconvénients du téléphone.
Dans le même temps, François adapte pour la télévision un roman de Léo Dartey, sous le titre de  Vacances 58 et enregistre Une Rose pour Charles Cros, disque qui obtient le Grand Prix de l’Académie Française
Le jeune écrivain ne s’est pas encore frotté au roman. Pourquoi ne pas commencer ? Alors que les représentations des Plus Beaux Métiers du Monde se terminent, sort en librairie la première édition de L’Animal. Viendra ensuite en 1957 : Royal Garden blues.
Le travail d’un conteur exige la solitude et cela ne convient pas à François. Il a besoin de rencontres, d’échanges. Il met fin à sa carrière de romancier après la parution de Brouillon d’un Bourgeois en 1961.

       3.  Les Premiers Succès

L’esprit toujours en éveil à la recherche d’une fiction, le jeune écrivain ne cesse d’inventer. Dans l’hebdomadaire Arts du 11 novembre 1960, l’ article qui lui est consacré se termine ainsi : « Billetdoux est le signataire d’environ mille sketches et de vingt-trois pièces de théâtre ».

Lorsque le 25 janvier 1959, les invités du Théâtre de Poche arrivent à la répétition générale de Tchin-Tchin (2)  ils sont intrigués. On leur a annoncé, une comédie en trois actes et quatre bouteilles, signé François Billetdoux, Certes, ce nom est connu des auditeurs de radio. Quotidiennement on écoute les émissions de celui-ci avec le plus grand plaisir, elles sont insolites, pleines d’esprit, espiègles, poétiques mais personne n’aurait parié que ce réalisateur ait le talent de créer deux personnages aussi tendres et pathétiques que le sont cette anglaise et cet italien déçus par la vie. Au premier acte, annonce le programme, Pamela et Césario boivent du whysky. Une boisson un peu sophistiquée, comme leur attitude ; ils apprécient ensuite le cognac, bientôt remplacé par le rhum. En dernier acte, ils redécouvrent la simplicité du « gros rouge » en même temps que celle de leur âme. La surprise est d’autant plus grande que l’auteur prend le risque de défendre son œuvre en interprétant le rôle de Césario, l’alcoolique. Il a pour partenaires Katarina Renn, une comédienne au talent rare et insolite ainsi qu’un débutant de dix-huit ans, Claude Berri, dont on parlera plus tard.

Affichée, pendant plus d’un an, la pièce obtient le Prix des U, récompense très convoitée parce qu’attribuée par l’association la plus généreuse de Paris. Ce sont les membres de cette société U, en l’occurrence les auteurs M. Achard, A. Roussin, G. Neveux, le directeur de théâtre Benoît Léon-Deutsch, les critiques J.J. Gautier, M. Favalelli et P.L Mignon qui se cotisent pour offrir une certaine somme à leur lauréat. Le 18 janvier 1959, Billetdoux reçoit de ses aînés un chèque global de 102.160 frs en hommage à son jeune talent.

Le succès de Tchin-Tchin encourage les directeurs de théâtre à faire appel à Billetdoux; qu’à cela ne tienne, François a plus de vingt pièces dans ses tiroirs. Il propose au Théâtre des Mathurins un manuscrit antérieur à celui de Tchin-Tchin, intitulé Le Comportement des Époux Bredburry.

L’action se passe aux U.S.A. Un beau matin, en prenant leur petit déjeuner John et Elisabeth Mortimer apprennent, par la lecture de leur journal, que leur amie, Rebecca Bredburry met en vente son mari. Le postulat est assez difficile à admettre, en dépit de l’explication de l’auteur : «  C’est une histoire vraie, j’ai la coupure de presse. Une Américaine a voulu vendre son mari pour 30.000$. J’en ai conclu que c’était par amour. On jette une vieille chaise, on se sépare à regret en le vendant d’un meuble de prix qu’on aime. Il faut de la générosité pour s’occuper ainsi de l’avenir de celui dont on veut se séparer pour se soucier de la personne auprès de qui on va le « placer … ».

La critique reste très mitigée à l’exception de Roger Nimier, avocat de la défense qui fait appel à de sérieux appuis : « Que cette pièce soit un chef-d’œuvre, la meilleure qui séjourne actuellement à Paris, il n’y a pas de raison particulière de croire l’auteur de ces lignes… Mais on peut croire Marcel Aymé, un spécialiste de l’amour et Jacques Chardonne un taste-vin du mariage ». (3)

Invité au Festival de Liège en septembre 1961, Antoine Bourseiller, nouveau directeur du Studio des Champs-Élysées, choisit de présenter son nouveau spectacle, Va donc chez Törpe, une comédie inédite de François Billetdoux. Il ne s’agit pas là d’une pièce dite « confortable ». On est loin du théâtre de digestion. Tout au long des quatre actes, le public se sent mal à l’aise, il est pris au piège comme le personnage principal, l’inspecteur Karl Topfer. Informé des multiples suicides qui se sont succédé dans l’auberge dirigée par Ursula-Maria Törpe, le policier vient enquêter auprès des pensionnaires. Comment se fait-il que cet endroit charmant soit l’hôtel du dernier séjour  ? Pourquoi les désespérés de l’Europe entière se communiquent-ils cette adresse pour y accomplir leur ultime volonté ? Quel secret Ursula-Maria Törpe détient-elle pour attirer ces malheureux chez elle ? L’interrogatoire n’apporte aucune réponse satisfaisante à ces demandes. Au contraire plus les questions se multiplient, plus les explications de l’hôtesse se font précises et plus la vérité s’estompe et plus le policier est troublé par cette femme étrange, mystérieuse, perverse qui le scrute et l’oblige à s’interroger sur lui.

Une salle pleine de spectateurs applaudissant tous les soirs, la même pièce ne suffit pas au bonheur de son directeur. Antoine Bourseiller se veut l’initiateur de recherches théâtrales. Aussi décide-t-il de monter un second spectacle en alternance avec Va donc chez Törpe, joué les jeudis, vendredis et samedis soir . Il fait appel à Eugène Ionesco, Jean Tardieu et François Billetdoux pour lui écrire chacun un acte sur un sujet identique, la Crise et la Dispute en amour – deux personnages, un même décor – une chambre, un lit, une armoire, trois portes. L’ensemble portera le titre évocateur de Chemises de Nuit. À son habitude, Ionesco démarre sur une quotidienneté la plus banale et en dérègle très vite le mécanisme. On reprochera à l’auteur une certaine analogie avec Amédée ou comment s’en débarrasser. Jean Vauthier ressuscite le suicidé Bada. (4) Il en fait un bonimenteur impuissant et idéaliste. Quant à François Billetdoux, il met en scène Berthomé, un jeune appelé qui, lors d’une permission, découvre que sa petite amie l’a trompé. Elle est en larmes parce que le godelureau séducteur vient de la laisser tomber à son tour. Bartholomé voudrait trouver une solution pour consoler la mignonne pendant son absence. Ces trois sketches rappellent furieusement les numéros de la Rose Rouge et de la Fontaine des Quatre Saisons. Le public s’amuse mais se lasse vite: «  C’est du Pierre Dac, sans Pierre Dac… », entend-on à la sortie du théâtre. Au bout d’un mois, Antoine Bourseiller met fin aux représentations et réaffiche Va donc chez Törpe en régulier.

(2) cf Analyse et critiques
(3) Arts 14 décembre 1960
(4) cf Capitaine Bada de Jean Vauthier Théâtre de Poche, 12 janvier 1952

       4.  Le Théâtre, un tyran bien-aimé

François a trente-sept ans. Son visage rond, son teint glabre, ses cheveux ras, ses sourcil noirs et touffus son regard de myope caché derrière de grosses lunettes lui donne un aspect de moine. Travailleur acharné, surchargé de commandes pour la radio, il a des projets de pièces plein la tête. Il a emménagé avec femme et enfants dans une maison de trois étages auprès du parc Montsouris. La vie y est réglée comme une mise en scène. Au rez-de-chaussée, le père a installé son bureau. Il se lève tard, écrit toute l’après-midi et une grande partie de la nuit. Les filles ont pour consigne de ne pas faire de bruit afin de ne pas déranger papa. On se retrouve pour le dîner à 20 heures précises. Selon l’avancement de son travail, le père est disponible ou non pour ses filles et sa femme. Si l’auteur est content de lui, il se montre un époux et un père très attentif et affectueux, sinon on mange en silence et on se passe des petits messages écrits à l’instar de ceux qu’on emploie dans la journée quand la communication est indispensable. Parfois en rentrant de l’École Alsacienne, Raphaële rencontre son père dans l’escalier. Il porte sa vieille « veste d’écriture dépenaillée », et « la toque en laine noire et rose des Carpates amollie sur le crâne  ». (5)

En 1964, un passage des Pensées  de Pascal: « Je ne sais qui m’a mis au monde, ni ce que c’est que le monde, ni que moi-même.. », retient l’attention de François et déclenche chez lui l’idée d’un projet fort ambitieux. Il se met au travail et quelques mois plus tard débutent, au théâtre de l’Ambigu , les répétitions d’une pièce au titre à la fois clownesque et shakespearien : Comment va le monde, Môssieu ? Il tourne, Môssieu !, (6) un western métaphysique selon l’auteur qui en assure la mise en scène, La distribution comprend deux rôles principaux, et soixante-quinze personnages interprétés par quatorze comédiens. Joseph Kosma est chargé de composer la partition d’accompagnement et la musique des huit chansons qui ponctuent la pièce à la manière des couplets brechtiens. L’action débute dans un camp de concentration nazi en hiver 1944 et se termine à l’automne 1945 aux confins de l’Amérique du Nord et du Mexique, un mois après le massacre atomique  d’Hiroshima.  Au cours des quatre actes, Billetdoux traite à sa manière les notions de liberté, de fatalité, de rapport entre les individus, de la position de l’homme dans l’univers…etc.. À la sortie de la générale, un certain public paraît heureux: « C’est un spectacle complet, unique » s’exclame Maître Maurice Garçon, et Sophie Desmarets surenchérit : «  Inoubliable»  mais les avis sont partagés. Il est à craindre que certaines critiques seront sévères le lendemain matin. François a permis à ses filles d’assister au spectacle. Il faut attendre maintenant le papier de Jean-Jacques Gautier, le maître à penser de la page-théâtre du Figaro. Cinq lignes de lui et le sort de la salle en est décidé. On affiche complet ou on ne joue que huit jours. Cette nuit de printemps 1964, dans une brasserie de la place de la République, Virginie et Raphaële tiennent compagnie à leurs parents pour attendre jusqu’à l’aube la parution du journal et connaître le verdict du Procureur général Gautier. Cette fois la guillotine est tombée, la pièce est assassinée. Et le retour à Montsouris est bien funèbre.

Quelques jours plus tard, dans un pied de nez réservé à l’illustre critique Gautier, Billetdoux reçoit le Prix du Cercle International de la Jeune Critique. Il en est très heureux, mais le spectacle monté en participation avec le théâtre a englouti une grande part de ses économies de son salaire d’auteur et de metteur en scène. «  Cette année-là et la suivante, nous ne partîmes pas en vacances ». (7)

Le proverbe a raison : « Après la pluie vient le beau temps ». En octobre de la même année, le spectacle suivant est un triomphe, mis en scène par Jean-Louis Barrault à l’Odéon – Théâtre de France : Il faut passer par les Nuages. Madeleine Renaud, admirable comme à l’accoutumée joue le rôle de Claire, une femme d’âge mur qui, dans sa jeunesse, connaît un amour malheureux puis se marie, devient chef d’entreprise. Deux de ses trois enfants décrochent de brillantes situations Elle doit soutenir le troisième faible et désaxé par la guerre. À l’automne de sa vie elle tente de se raccrocher à son premier amour défunt . Elle parcourt un chemin intérieur qui la mène au sacrifice d’elle même et à sa ruine matérielle. «  Tels sont les nuages qu’elle rencontrera dans cette volonté d’ascension. Elle aura le courage de les traverser…au risque de paraître folle » écrit Jean-Louis Barrault dans le programme. La pièce enchante le public et l’article de Jean-Jacques Gautier a pour titre : « Une œuvre d’une qualité exceptionnelle… ». Requinqué, Billetdoux, au soir de la générale, répond à tous les interviewers : « Maintenant c’est au public de travailler. Il est temps qu’il apprenne à jouer sa partie. Après tout, nous aussi, de la scène, on le regarde », (8)« Le Théâtre ? J’en fabrique ! J’en consomme ! Je m’y frotte ! Je m’y pique ! Je m’y « bataille ». ! C’est quelque chose qui se fait comme l’amour.. »(9) À la suite de cette déclaration enflammée, François Billetdoux disparaît, pendant deux ans et demi, des scènes traditionnelles.

(5) Chère Madame ma fille cadette Raphaële Billetdoux ed. Grasset.
(6)  cf.Analyse et critiques
(7) Chère Madame ma fille cadette Raphaële Billetdoux ed Grasset
(8) Le Figaro 23 octobre 1964
(9) France-Soir 24 octobre 1964

   5.   Une nouvelle conception théâtrale

Dans le cadre de l’Eurovision. la direction de TF1 a fait appel à son talent et lui a signé un contrat pour participer à une fiction dramatique, réunissant dix sept réalisateurs de pays différents Pitchi Poï ou  La Parole donnée. En quête de son personnage – une femme juive qui, après la guerre, recherche sa fille disparue – Billetdoux parcourt l’Europe en «  commis voyageur » . Lors d’une interview à Jean Chalon, il prophétise,: «  Je ne prétends plus être auteur, mais un coéquipier d’une œuvre collective. Ce n’est plus en Eurovision qu’il faut penser mais en Mondovision. Il faudra bientôt que les écrivains comptent avec le langage nouveau, c’est-à-dire qu’ils apprennent à penser international ». (10)

Festival d’Avignon 1967, Antoine Bourseiller met en scène une évocation du mythe d’Orphée, Silence l’arbre remue encore avec Serge Reggiani dans le rôle d’un menuisier savoyard en lutte contre lui-même. François est péremptoire, cette pièce sera la dernière. Il n’écrira plus pour le théâtre, c’est bien fini. Serment d’ivrogne: six mois plus tard, le 12 décembre, le théâtre municipal d’Aix en Provence affiche Bien amicalement d’un certain Billetdoux que l’on n’a pas oublié .

Rangeant ses papiers, François retrouve le manuscrit du jeu théâtral, créé au festival de Spolète en l’été 1968. Le sujet lui paraît intéressant. Initialement la pièce durait cinquante cinq minutes et ne comprenait que trois rôles. Billetdoux allonge la sauce, mais en garde le principe : sept personnages, placés devant sept portes, symbolisant sept lieux différents, n’ont aucun rapport entre eux soliloquent et se débattent chacun dans une situation dramatique particulière. Le spectateur est libre de choisir, d’écouter l’un ou l’autre personnage, sans se préoccuper de son voisin, comme dans la vie. Cette « expérimentation d’études scénique » est programmée tout d’abord au Montparnasse, mais le théâtre tient le succès des Quatre Saisons d’Arnod Wesker et le directeur M. Lars Schmidt refuse de l’interrompre.

C’est alors qu’intervient Marie Bell, nouvelle directrice du Gymnase. Elle aime les œuvres de Billetdoux et se réjouit d’en monter une. Le spectacle au titre insolite de 7 + Quoi fut accueilli « par une salve d’insultes et de coups de sifflets. On se demanda même à l’entracte si on n’allait pas rembourser. Rarement de mémoire de parisiens pièce n’avait suscité pareille consternation ». (11) Le spectacle fut joué deux fois. D’un commun accord, l’auteur et le metteur en scène, M. Cacoyannis, mettent fin au massacre en déclarant à la presse : « L’ouvrage ne convient pas au public habituel de cette salle, nous allons chercher une nouvelle salle… ». En réalité la pièce ne fut jamais reprise.

Cet échec ne décourage pas Billetdoux dans ses recherches de nouvelles approches théâtrales . Il prépare pour le Festival de Vaison la Romaine, un divertissement sur le thème de la Paix universelle : Quelqu’un devrait faire quelque chose  au cours duquel les spectateurs sont appelés à collaborer au déroulement du spectacle : « Il faut échapper déclare-t-il au cours d’une conférence, à la muséographie en invitant spectateurs et écrivains, à participer aux émotions scéniques de notre temps ».

En Novembre 1970, le théâtre de l’Odéon accueille pour six représentations, trois auteurs dit d’avant garde Romain Weingarten, Roland Dubillard et François Billetdoux. Ce dernier présente Femmes Parallèles : trois monologues, écrits séparément, mais joués simultanément. Les comédiennes, Denis Gence, Catherine Samie et Christine Fersen interprètent les rôles de ces trois femmes, aussi prisonnières que l’étaient les filles de La Maison de Bernarda de Federico Garcia Lorca. Toutes trois ne cessent de rêver à un hypothétique amant. Toutes trois sont impuissantes à assumer leur destin.

(10) Le Figaro Littéraire 30 octobre 1967
(11) Paris-Presse 28 janvier 1969

6.   À la recherche de formes scéniques inédites

Au soir du 1er février 1972, Jean Mercure, directeur du Théâtre de la Ville, est inquiet. Comment son public va-t-il recevoir la nouvelle pièce de François Billetdoux au titre extravagant de Rintru Pas Trou Tar Hin ! (12) Traduit en bon français ce grommellement signifie : Ne rentre pas trop tard, hein ! L’auteur, interrogé par la presse, s’en explique : « Je me suis toujours préoccupé des problèmes sonores. Nous appartenons à un monde de plus en plus oral. Je cherche à faire ressentir certains états où nous pouvons nous trouver aujourd’hui dans ce monde de catastrophes ». (13) En parodiant la reconstitution télévisée d’un attentat en direct, l’auteur cherche à faire de Rintrou pa trou tar, Hin ! un psychodrame destiné à provoquer l’aveu des présumés coupables. Le superbe décor de Yannis Kokos ne suffit pas pour faire du spectacle un triomphe populaire

Incompris mais nullement déçu, Billetdoux dédaigne l’admiration du grand nombre. Plus le temps passe et plus il se consacre au travail de laboratoire , il compose désormais pour les initiés et non pour le public du samedi soir qui ne va au théâtre que pour se divertir ou pour être ému. C’est dans cet esprit qu’il écrit un poème-spectacle : Ne m’attendez pas ce soir. Le petit Odéon affiche cet acte, évocation de Gérardl de Nerval et de Guillaume Apollinaire, à 18h.30, le 20 octobre 1971 .

Billetdoux aime s’expliquer auprès du public avant que ne commence la pièce : « Fort de ma faiblesse d’homme vulnérable au désordre d’aujourd’hui, je tente d’improviser ici quelque chose qu’on pourrait nommer « La Chanson du mal aimant » J’ignore encore si ce sera une messe basse ou une clownerie. Cela dépendra des communiants. Méchants s’abstenir ! ». Puis face à une immense poupée, l’auteur, portant cravate de clown, culotte courte, perruque blanche et gros nez rouge, se met en scène et interprète lui-même le rôle d’un homme vieillissant, mal aimé et mal aimant.

Hélas la presse est cruelle et s’en donne à cœur joie : «  Que peut vouloir dire ce fatras de mots, ce fouillis de phrases, ce bric à brac d’idées en folie ? »(14)

Billetdoux ne cherche pas à se défendre, il est déjà sur une autre piste. Il a rencontré Jacques Voyel. Ce dernier lui a montré ses marionnettes Shamanes de deux mètres de haut, souples, sans fil, sans gaines. Le manipulateur, qui permet à ses poupées de se mouvoir, se comporte comme un personnage pouvant cacher sa propre action derrière celle de son double. Billetdoux s’enthousiasme et cette découverte engendre en lui une inspiration nouvelle dont l’aboutissement en seront Les Veuves,  « tapisserie lyrique », créée en co-production avec France Culture, le 18 juillet 1972 au Festival de Vaison-la Romaine et reprise le 26 octobre 1972, à l’espace Cardin. Tandis qu’en coulisses s’affairent les techniciens du son, sur scène, les comédiens, dont François Billetdoux et sa fille aînée Virginie – devenue comédienne -, se mêlent aux mimes, au chanteur-musicien et aux manipulateurs de marionnettes. Cette fois public et critiques sont conquis. On parle de  « présence magique dans un espace aussi magique »,(15) de « Poème dramatique d’une ligne très pure qui nous conduit aux lisières du réel et du rêve », (16) de l’ « accord parfait de cette musique, de cette tendresse avec les étranges marionnettes (qui) donne au spectacle son mystère et sa beauté »(17) « aucun mot n’est assez fort pour traduire l’éblouissante beauté de ce grand ballet gestuel… » (18)

(12) cf Analyses et critiques
(13) Nouvelles littéraires 12 février 1971
(14) l’Aurore André Ransan 26 octobre 1971
(15) Combat Frédéric Mignon
(16) L’Aurore André Ransan
(17) France Soir Pierre Marcabru
(18) L’Humanité Dimanche Jean-Paul Liégeois

 7.   Un personnage officiel

Au cours des deux années qui suivent François Billetdoux n’a guère le loisir de s’adonner à l’écriture. Il a été nommé Membre du Conseil du Développement Culturel de l’O.R.T.F puis Membre du Conseil de L’Audiovisuel. Il participe, en tant qu’auteur, aux émissions de Frédéric Rossif consacrées à la vie des animaux.

En 1974, sur la demande de Jean-Pierre Miquel, assistant de Pierre Dux, François Billetdoux écrit pour l’Odéon « une partition théâtrale » : La Nostalgie, Camarade !   Reçue par le Comité en décembre 1973, la pièce sera jouée le 1er octobre 1974. «  La nostalgie, confie Billetdoux à la journaliste du Monde, venue l’interviewer, est une habitude qui s’inscrit dans l’air du temps et la tendance actuelle est répressive, on la retrouve dans la recherche des autonomistes, des écologistes ,elle répond à une signification globale : la peur du futur, le retour au passé. c’est là qu’intervient pour nous, le personnage de Bougre Jacques qui représente le modèle très occidental du hippie, un hippie dont l’idée ne serait pas le refus mais l’approfondissement des choses ».

Il n’est pas certain qu’au soir de la répétition générale, l’ensemble du public ait été prêt à écouter un discours évangéliste sur le besoin de Fraternité, nécessité planétaire. Vers la moitié du premier acte – acte qui dure deux heures – des coups de sifflets partent du balcon, s’ensuit un brouhaha inattendu et tumultueux qui se poursuit en coulisses. Des spectateurs de l’orchestre protestent, l’un d’eux se retournant vers les perturbateurs leur crie: «  Si vous n’aimez pas cela, allez chez Dorin ». Au premier rang de corbeille, imperturbable et amusée, Françoise Dorin (19) qu’accompagne M. Rouzière, directeur du théâtre du Palais Royal sourit gentiment…

La presse du lendemain reconnaît dans son ensemble que François Billetdoux a beaucoup de talent mais qu’il est bavard, brouillon et confus. D’après Dominique Jamet :  « La Nostalgie Camarade  est une grande pièce, 3h1/4 , 14 tableaux, 50 personnages. C’est une pièce-somme. Comment faut-il l’entendre ? Un somme ou une somme ? disons qu’il y a des deux. » (20) Quant à Jean-Jacques Gautier, après un aveu inquiétant : «  Je crois qu’à l’entr’acte, pour un peu, j’aurais mordu les gens et mon fauteuil » s’interroge : « La question qui demeure posée est la suivante : cela vaut-il de supporter 3h et demi d’ennui et d’exaspération pour vingt minutes merveilleuses ? ».

Décidemment les gens du spectacle n’entendront jamais rien à la religion de Billetdoux de faire du Théâtre une recherche métaphysique permettant de « se mesurer avec l’espace, son corps, la parole… ».

(19) Françoise Dorin remporte un triomphe avec Le Tournant au Théâtre de la Madeleine
(20) L’Aurore Dominique Jamet 19 octobre 1974

8.   Auteur décrié, écrivain reconnu

À quoi bon s’entêter à faire l’auteur quand on est incompris, quand la direction de l’O.R.T.F. en appelle à votre talent et vous charge de transformer la radio en une source de communication, et non plus seulement en un moyen de diffusion. ! Pourquoi perdre son temps ? C’est une question de bon sens !

Pendant sept ans, mise à part une courte pièce Ai-je dit que j’étais bossu ?, montée en 1981 par Roger Blin au Petit Montparnasse. Billetdoux déserta les scènes et les coulisses. « Si je me suis arrêté de produire des œuvres nouvelles, c’est comme un compositeur auquel on aurait interdit l’accès à l’instrumentalisation et qui en outre se serait fait trop souvent rabrouer parce qu’il tape comme un sourd sur le piano ». (21)

Chevalier de la Légion d’honneur en 1975, Billetdoux fut nommé vice-président, puis président de la Société des Gens de Lettres. Très à l’écoute de ses confrères il s’efforce de défendre et de développer leurs droits face au Ministère. Homme d’innovations, il fonde la Société Civile des Auteurs Multimédias ( S.C.A.M.) accepte le poste de vice-Président du Conseil Permanent des écrivains et devient membre coopté de la Commission Nationale Française de l’U.N.E.S.C.O.

Lorsqu’en 1979, Pierre Dux prend sa retraite d’administrateur de la Comédie Française, le poste est proposé à François Billetdoux. Il refuse. Il n’a pas l’âme d’un conservateur. Exalter et chouchouter les œuvres d’auteurs morts ne l’intéresse pas.

En 1986, le vieux démon du théâtre réapparaît plus tentateur que jamais sous la forme du comédien Claude Rich. Billetdoux finit par se laisser convaincre et reprend sa plume de « pauvre griot du monde occidental ». Son nouvel ouvrage s’appelle Réveille-toi Philadelphie , c’est, une fois encore, un conte, l’histoire d’une petite fille qui rêve du loup-garou et de son père, un doux fada sans mémoire. Rich donne le manuscrit à Jorge Lavelli , nouveau directeur du Théâtre de la Colline. Ce dernier s’enthousiasme et décide de monter la pièce à juste raison car le succès remporté est exceptionnel : « Quelle langue !, quelle fantaisie ! , quelle audace ! quelle jeunesse ! » s’exclame Armelle Héliot.  L’auteur sera couronné par le Prix du Syndicat de la Critique Dramatique et Musicale et le Prix de la Littérature Dramatique de la Ville de Paris, récompense reçue des mains du maire sous les ors de l’Hôtel de Ville. Le Molière du meilleur auteur lui sera attribué lors de la cérémonie de 1989.

(21) Le Monde 13 octobre 1988

 9.   Une gloire fugitive

À soixante-deux ans, François Billetdoux est enfin reconnu de ses pairs, il est considéré au Ministère de la Communication comme un personnage de la plus haute importance; sa fille Virginie fait carrière en tant que comédienne, sa cadette Raphaële, écrivain de talent, est lauréate du prix Renaudot. François est un homme heureux. Mais ce bonheur n’est qu’un leurre qui ne le trompe pas. La maladie est là qui le guette, l’asticote, le poursuit… En dépit des examens médicaux aux résultats tout d’abord imprécis, puis inquiétants et finalement implacables, il travaille.

En septembre 1991, il tourne un film dans les rues du 14ème arrondissement. Les trois femmes de sa vie, son épouse et ses filles sont là : «  Gardiennes du secret médical, nous le suivions comme on suit des yeux l’équilibre sur ses jambes d’un bébé qui va faire pouf… » (22)

Le 26 Novembre 1991, à trois heures du matin, François Billetdoux s’éteint à l’hôpital après avoir prononcé ces mots: «  Je me débrouillerai…. Il faut que je parte… ».

(22) Chère madame ma fille cadette Raphaële Billetdoux édition Grasset


10. Quelques pièces

1955  – À la nuit, la nuit – 12 mai  – Théâtre Daunou
1959  – Tchin – Tchin – 25 janvier  – Théâtre de Poche
1960  – Les Époux Bredburry – 27 novembre  – Théâtre des Mathurins
1961  – Va donc chez Torpe -27 septembre – Studio des Champs-Élysées
1964  – Comment va le Monde, Môssieu ? Il tourne, Môssieu ! – 14  mars – Ambigu
1964  – Il faut passer par les nuages – 21 octobre  – Odéon-Théâtre de France
1967  – Silence, l’arbre remue encore ! – 13 août – Festival d’Avignon
1967  – Bien amicalement  – 12 décembre  – Opéra  municipal  d’Aix en Provence
1969  – 7 + Quoi – 22 janvier – Théâtre du Gymnase
1969  – Quelqu’un devrait faire quelque chose – 27 septembre – Vaison la Romaine
1970  – Femmes parallèles  – 2 novembre  – Comédie Française
1971  – Rintru pas trou tar hin !  – 26 février – Théâtre de la Ville
1971  – Ne m’attendez pas, ce soir  – 20 octobre – Petit Odéon
1971  – Passion  selon vos doutes  – 9 novembre  – Opéra de Lyon
1972  – Le Chapeau soleil – 18 août  – Festival de Carpentras
1972  – Les Veuves  – 25 octobre – Espace Cardin
1974  – La Nostalgie, camarade ! – 16 octobre – Comédie Française-Odéon
1981  – Ai-je bien dit que je suis bossu – 13 janvier – Petit Montparnasse
1984  – Réveille-toi, Philadelphie ! – 5 octobre  – Théâtre de la Colline